Il y a quelques mois tu m’avais annoncé la mise en route prochaine du magazine « Éducation en marche » auquel tu m’avais aimablement invité à contribuer. Je tiens à te féliciter hautement pour l’arrivée de cette nouvelle publication dans le domaine de l’éducation. Au vu du riche sommaire des deux premiers numéros, il apparaît déjà que « Éducation en marche » est un espace de dialogue et de débat sur les sujets majeurs de l’éducation en Haïti. Je te renouvelle ma volonté de continuer à contribuer à la réflexion offerte en partage par « Éducation en marche » dans mes champs de compétence (aménagement linguistique, dictionnairique français-créole et lexicographie créole, jurilinguistique et droits linguistiques…).
J’ai pris note avec la meilleure attention que « Éducation en marche » comprend des rubriques variées et amplement informatives, notamment les rubriques « Réflexions sur l’éducation » ainsi que « Chroniques » qui consigne des articles tels que « La réforme Bernard : une réforme pédagogique », « Refleksyon sou lang kreyòl la », etc. Je suggère l’ajout d’une rubrique, « Pages retrouvées », qui offrira aux lecteurs des études et articles peu connus et/ou qui sont tombés dans l’oubli et/ou qui méritent d’être revisités. Exemples : (1) Pradel Pompilus, « Le fait français en Haiti » (Actes du colloque sur les ethnies francophones (Nice, 26-30 avril 1968) ; (2) Renauld Govain (2013), « Enseignement du créole à l’école en Haïti : entre pratiques didactiques, contextes linguistiques et réalités de terrain », in Frédéric Anciaux, Thomas Forissier et Lambert-Félix : voir Prudent (dir.), Contextualisations didactiques. Approches théoriques, Paris, L’Harmattan ; (3) Renauld Govain (2014) « L’état des lieux du créole dans les établissements scolaires en Haïti » (revue Contextes et didactiques 4/2014). J’ai présenté ces deux études du linguiste Renauld Govain dans l’article « De l’usage du créole dans l’apprentissage scolaire en Haïti : qu’en savons-nous vraiment ? » (Le National, 11 novembre 2021).
Également, je suggère que la rubrique « Réflexions sur l’éducation » soit enrichie de trois sous-rubriques, « Didactique des langues et éducation », Évaluation des outils didactiques en usage dans l’École haïtienne » et « Politique linguistique éducative ». Ces sous-rubriques pourraient faire appel à la contribution de didacticiens tels que Fortenel Thélusma, Lemète Zéphyr, Darline Cothière, Pierre-Michel Laguerre et Wilson Dorlus, enseignants-chercheurs à l’Université d’État d’Haïti. La linguiste-didacticienne Darline Cothière, qui vit à Paris, est l’auteure entre autres du « Cadre pour l’élaboration de la politique linguistique du MENFP » / « Aménagement linguistique en préscolaire et fondamental », et du « Référentiel haïtien de compétences pour le français et le créole / Referansyèl ayisyen konpetans pou lang franse ak kreyòl » daté du 15 mai 2018. Le linguiste-didacticien Fortenel Thélusma est l’auteur de plusieurs manuels d’enseignement du français ainsi que de « Réflexions sur l’enseignement-apprentissage du français en Haïti : Faut-il l’enseigner-apprendre comme langue étrangère ou comme langue seconde ? » (Potomitan, 6 septembre 2012). La sous-rubrique « Didactique des langues et éducation » pourrait aussi faire appel à la contribution de linguistes-lexicographes connus pour la très grande qualité de leurs publications lexicographiques, notamment Albert Valdman, auteur entre autres de « Vers un dictionnaire scolaire bilingue pour le créole haïtien ? » et du dictionnaire de référence le « Haitian Creole-English Bilingual Dictionnary ».
Je me réjouis que « Éducation en marche » consigne plusieurs de mes articles offerts à une commune et rassembleuse réflexion, notamment « L’aménagement du créole en Haïti à l’épreuve du « Cadre d’orientation curriculaire » du ministère de l’Éducation nationale », « Créole haïtien : plaidoyer pour un référentiel méthodologique standardisé et unique en terminologie scientifique et technique », « Le LIV INIK AN KREYÒL et la problématique des outils didactiques en langue créole dans l’École haïtienne ».
Dans le contexte où l’École haïtienne, sous-financée et mal gouvernée, souffre continûment de multiples maux systémiques, de dérives programmatiques et des différentes manifestations du rachitisme de vision et des errements des Ayatollahs du créole, « Éducation en marche » a un rôle majeur à jouer en termes de rigueur de la réflexion et d’accompagnement auprès des intervenants de notre système éducatif national.
Je formule le vœu qu’au fil de ses livraisons et attaché à une réflexion rigoureuse et rassembleuse, le magazine « Éducation en marche » devienne l’outil de référence des enseignants, des directeurs d’écoles, des didacticiens, des rédacteurs et éditeurs de manuels scolaires et des cadres du système éducatif national.
Robert Berrouët-Oriol
Linguiste-terminologue