De la nécessité de l’usage du numérique pour supporter l’apprentissage des élèves « lòk »

On est au début du mois de novembre de l’année scolaire 2019-2020. Depuis deux mois, les portes d’une grande majorité d’établissements scolaires urbains du pays sont fermées : conséquence directe de la crise sociopolitique que traverse le pays. En revanche, par souci de garder les enfants d’âge scolaire accrochés à leur rythme d’apprentissage tout en étant chez eux, des parents, par la force des choses, sont devenus entre autres, des transmetteurs de savoirs et des accompagnateurs. Souhaitant pousser la réflexion sur un enseignement de qualité dans le contexte sociopolitique actuel, un questionnement s’impose : parents et enfants sont-ils prêts psychologiquement ?

À cela s’ajoute, des enseignants-tuteurs non avisés, mais obligés d’adapter le contenu de la discipline enseignée pour être partagé à distance afin de soutenir l’apprentissage au-delà des murs de l’école. Que ce soit par courriels, Google Doc, Google Classroom, le partage des devoirs et des leçons est l’une des façons de garder les enfants occupés à des tâches scolaires à distance. Cependant, il appert que cette approche est faite dans un environnement marqué par une double absence : celle de stratégies et modèles d’intégration technico-pédagogique préalablement définies par les directions d’écoles et celle d’une politique officielle d’intégration des Technologies de l’Information et de la Communication dans l’Enseignement (TICE) du Ministère de l’Éducation Nationale et de la Formation Professionnelle (MENFP). Prenons le cas des contenus d’apprentissage envoyés sur WhatsApp, accessibles via les téléphones mobiles des parents. Il s’agit, ni plus ni moins, que de l’apprentissage mobile [1]. Force est de reconnaitre que les appareils mobiles ajoutent une certaine spontanéité à l’apprentissage en tout temps et à tout moment. Néanmoins, quatre défis majeurs de cette approche devraient nous interpeller :

     ▪    la confidentialité de l’espace téléphonique parental;

En outre, ne serait-il pas important de s’interroger sur le rapport des élèves au numérique dans le quotidien familial dans la mesure où celui-ci peut affecter leur disposition et leur aptitude à apprendre avec le numérique tant en période « normale » qu’en période de crise.

Malgré l’importance que montrent les technologies à travers leur impact sur l’engagement, la motivation et l’autonomie scolaire des apprenants, on constate qu’á l’école en Haïti l’usage du numérique dans le processus enseignement-apprentissage de façon permanente et structurée demeure jusqu’à présent un immense défi.

Au-delà de l’accès gratuit aux contenus éducatifs grâce à des plateformes en ligne telles que : Khan academy, code.org, (pour l’apprentissage des Mathématiques, Sciences et de l’Informatique), il serait temps d’établir, une fois pour toute, une culture d’enseignementapprentissage numérique dans l’école haïtienne qui vise particulièrement à :

 

Il est certain que tout cela ne sera possible que si d’une part, le MENFP définit un cadre de référence et adapte le curriculum actuel selon les prescrits d’une éducation numérique ; et si d’autre part, l’enseignant s’engage continuellement dans une démarche de développement professionnel d’acquisition des compétences adéquates à l’usage efficace des technologies à portée éducative existantes et émergentes. Il sera également important de développer un pôle d’éducation parentale visant à définir une place pour les parents dans l’utilisation équilibrée et saine du numérique par leurs enfants. De plus, toute politique publique en matière d’utilisation du numérique devra se garder de creuser le fossé numérique et les inégalités qui marquent le système éducatif actuel.

La situation actuelle reste marquée par l’incertitude absolue sur la reprise des activités scolaires.

Si on n’est pas dans le secret des dieux, il est difficile de savoir à quelle période de l’année scolaire

2019-2020, les élèves seront « delòk » en relation avec cette conjoncture politique qui perdure. Le

MENFP est dans l’incapacité de fixer une date pour une reprise généralisée des activités scolaires.

Les parents, majorité silencieuse, sont inquiets en pensant à la perspective d’une éventuelle année scolaire perdue. Psychologiquement, il est évident que les élèves s’ennuient après tant de jours d’inactivité cognitive.  On peut penser, sans grande chance de se tromper, que l’usage du numérique au service de l’enseignement et l’apprentissage dans les écoles haïtiennes est plus qu’une nécessité et non un simple effet de mode.

 

Bibliographie

 

Sherly Ambroise

Technologue de l’éducation

Twitter : @shambroise

 

 

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